La Tempête : Shakespeare

Publié le : 19 décembre 20185 mins de lecture

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La Tempête

prospero

William Shakespeare
1611

Un petit classique, pour ce nombril de semaine ? Allez !

J’ai lu La Tempête cet été, et je n’ai encore jamais pris le temps de le chroniquer : honte sur moi ! La question qui vous tarabuste tous, je le sais : mais qu’est-ce qui lui a pris de se prendre le chou avec du SI VIEUX pendant ses vacances à la plage ? Et bien figurez-vous que j’en ai eu marre de lire des bouquins anglo-saxons qui NE CESSENT de faire référence à cette pièce de théâtre sans comprendre les allusions. Alors je me suis pris par la main, ai navigué quelques secondes sur internet pour le trouver en téléchargement gratuit (et légal : William est mort depuis plus de 70 ans. Sisi.) et je l’ai intégré à ma super-liseuse. J’ai passé un super moment !

L’histoire ? Un navire qui s’échoue mollement sur une plage. Un mage ermite qui a généré ce naufrage, en manipulant la météo. Sa fille, qui tombe amoureuse du fils de Machin, que déteste justement l’ermite. Bref, une tragi-comédie baroque au possible. Mais soyons plus précise : Prospéro est un noble milanais envoyé en exil sur une île paumée avec sa fille Miranda. Par le pouvoir magique des livres qu’il possède, il peut commander aux éléments et aux esprits. Ainsi ordonne-t-il à Ariel, bénéfique esprit de l’air, et à Caliban, maléfique esprit beaucoup plus chthonien et dont la mère est la sorcière à qui appartenait l’île auparavant. Pour se venger de son exil, Prospéro fait échouer le navire d’un autre noble, celui à cause duquel il se retrouve en exil. Ce dernier est venu avec son fils, et bien sûr, les deux jeunes tombent amoureux.

Le scénario en lui-même n’a rien d’exceptionnel. On en retrouve une bonne part dans des Roméo et Juliette, par exemple. Mais ça ne pose aucun problème, car là n’est pas l’enjeu de la pièce de théâtre. On le sait, Shakespeare est bien plus visionnaire que simple dramaturge… Le cœur du propos, c’est le personnage de Prospero. Ancien noble exilé, mais surtout mage par la puissance des livres (je crois même qu’il n’y en a qu’un seul… Mage par la puissance du Livre ?), il est le démiurge de la pièce. Il commande aux éléments, dompte le mal (sous la forme de Caliban, bien plus complexe que simple représentation axiologique du reste), mais surtout, il mène la danse et contrôle absolument toute l’histoire, de bout en bout. Figure divine, peut-être. Figure de l’Auteur, celui qui écrit l’histoire dans son livre blanc, sans doute. Et aussi Figure du Lecteur/Conteur, dont l’imagination et le verbe donnent vie à ce qui a été préalablement créé.

Symboliquement, la pièce est extrêmement riche. Beaucoup trop pour tout évoquer. Mettons un point spécial sur l’île, que j’affectionne tout particulièrement : espace clos et relativement restreint, c’est une scène idéale. Une unité de lieu offrant des possibilités de variation malgré tout (la grève, l’antre de Prospéro, la forêt…). Un monde hors du monde aussi : les mythes du Nord de l’Europe, particulièrement  de la Bretagne médiévale (comprendre la Grande Bretagne actuelle, pas si loin que cela de l’époque de Shakespeare) faisaient de la mer cet espace liminal qui sépare le monde des morts de celui des vivants. Le monde des fées, de la magie, de la puissance de l’esprit et du rêve de celui, matérialiste et réaliste, dans lequel nous évoluons difficilement. Cet univers onirique, nous le traversons naturellement quand nous nous endormons, quand nous traversons l’océan et les brumes, mais aussi quand nous ouvrons un livre ou que nous allons au théâtre…

Je n’en dirai pas plus. Ce n’est pas le lieu pour développer une analyse du texte, et comme je l’ai lu en Français, j’en aurai perdu la substantifique moelle en termes poétiques, je le sais. Je ne saurais que vous conseiller de vous laisser embarquer, puis échouer sur cette île pour vivre, vous aussi, cette expérience littéraire.

Je vous le conseille d’autant plus que comme je le disais plus haut, ce texte est fondateur dans la littérature anglo-saxonne, et a inspiré nombre d’auteurs, et autres artistes. Par exemple, Dan Simmons, qui en fait un des éléments de fond dans son diptyque Ilium Olympos, que j’avais tant aimé.

Un incontournable, d’une richesse incroyable !

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